J'avais pas compris...
Bien le bonsoir, lecteur décembriste.
Oui, ce mot n'existe pas. Si j'étais une illustre poètesse, on dirait que je viens de créer un néologisme, on parlerait de licence poétique. Mais comme je suis juste une titcheur lambda, on dira simplement que c'est un barbarisme, un outrage à la langue française et que je devrais être pendue par les coudes pour malmener ainsi notre belle langue, moi qui suis chargée d'éducation auprès de notre vivace jeunesse.
Oué. Sauf que plus. Ou en tous cas, plus pour quelques temps. Car je t'annonce, cher lecteur, que je prends un congé parental de 6 mois. Après quelques (brèves) hésitations, j'ai décidé que reprendre le boulot en janvier n'avait aucun sens.
Pédagogiquement, d'abord. Reprendre des classes en cours d'année est assez difficile, tu es sans cesse comparée à ta remplaçante "qui faisait pas pareil et mieux" en général. Comme tu commences à me connaître, tu sais qu'il me faut bien 3 mois pour intégrer les prénoms de tous mes élèves. Tu imagines le ridicule fini de toujours pas se souvenir de qui est Jean-Jason et Marie-Zahia à Pâques? Non, non, non, me suis-je dit. Il vaut mieux préserver tout le monde et laisser à mes nains de lycée l'excellente remplaçante qui officie à ma place depuis septembre afin de ne pas les perturber.
Maternellement ensuite. Il m'est juste intolérable de ne serait-ce qu'envisager de laisser Mamerveille pour une demi-journée. Alors la laisser à une nounou (faute de place en crèche) qui aura le privilège de tous ses sourires et toutes ses couches atomiques: je dis NON. J'ai encore besoin d'être avec elle, de l'allaiter, de lui chanter des comptines pour l'endormir, de m'extasier devant ses moindres mimiques, de sentir sa tête posée dans le creux de mon cou…
On m'avait dit "tu verras, un enfant, ça change la vie". Je m'en doutais, mais j'étais loin, très loin du compte.
Ce n'est pas tant les nuits écourtées, la fatigue ou les sorties moins fréquentes. Ni non plus la réorganisation totale de ta vie où réussir dans la même journée à prendre une douche ET faire les courses relève du record olympique. Non. C'est ce sentiment d'amour inconditionnel et illimité auquel je n'étais pas préparée.
Je n'avais pas compris que tout à coup un être humain allait compter à ce point pour moi. Je ne pouvais pas imaginer l'intensité de cet amour, ce coup dans les tripes, cet enivrement total pour un petit être sorti de moi il y a à peine 2 mois. Comment aurais-je pu anticiper un tel chambardement émotionnel? On m'avait prévenue, mais je n'avais pas compris. Je ne pouvais pas comprendre…
Que dorénavant, il y a ELLE, qui passe avant tout, avant moi, avant Tendrépoux même. Que je l'aime tellement fort que parfois ça fait mal. Que me séparer d'elle m'est, pour l'instant, impossible.
Alors oui, je prends un congé parental: 6 mois de plus pour finir l'année scolaire. J'ose espérer que la séparation sera moins dure en septembre. Qu'une année (presque) entière passée à profiter d'elle me suffira et me motivera pour reprendre le boulot. Mais j'estime qu'après toutes ces années passées à essayer de la fabriquer, j'ai bien le droit d'en profiter un peu… Non?